Instances nationales : le devoir du courage
Dans moins de deux semaines, l’Espérance Sportive de Tunis (EST) entame un virage important de son parcours continental. En effet, l’unique représentant de la nation en Orange CAF Champions League va devoir négocier un match décisif pour le reste de la compétition. Et pour réussir à passer ce cap, le club Sang et Or a besoin de toutes ses forces vives, cela va de soi.
Or, depuis le début de son périple africain, l’Espérance s’est trouvée condamnée à se passer de son soldat inconditionnel; j’ai nommé le public. Les poulains de Maâloul ont à maintes reprises dû subir un huis-clos trop rigide, que ce soit sous l’effet de sanctions ou par mesures de sécurité nationale. Et là, le club s’est retrouvé doublement pénalisé, car outre l’énorme manque à gagner au niveau financier, l’Espérance avait dû endurer des challenges en étant privée de sa plus grande force. Et Dieu sait ce que la présence de 60 000 supporters fidèles pouvait apporter en motivation. On en a vécu l’expérience récemment à Casablanca.
Maintenant, et du moment que l’Espérance, en tant que composante du tissu associatif national, a accepté de supporter ce lourd tribu, il devient un devoir national que de lui apporter un soutien particulier. Surtout que le club représente, désormais, une Tunisie libre et responsable. Il est impératif que le public Sang et Or soit pleinement présent dans l’antre de Rades, voire d’El Menzah, pour compléter le tableau et relever ce défi. C’est un élément essentiel et incontournable pour la réussite du club à passer ce cap épineux de la plus brillante des façons.
Le rôle des instances nationales
Le ministère du sport, première instance nationale responsable du football tunisien, est le mieux indiqué pour apporter la première pierre à cet édifice. Sa position clef apporterait un volume important et une touche patriotique nécessaire à cette requête. Il y a là une opportunité exceptionnelle du ministère de tutelle de faire la preuve irréfutable que ses premiers responsables veulent, vraiment, aller de l’avant et réconcilier le sport national avec ses valeurs réelles. Des valeurs que l’Espérance incarne par excellence.
La Fédération tunisienne du football (FTF) peut, elle aussi, apporter une contribution importante à cette revendication. L’instance exécutive sait pertinemment les retombées financières lourdes que le huis-clos fait subir au club (billetterie et droits de retransmission TV) et à la fédération elle-même. Elle a vraiment intérêt, elle aussi, à redresser sa situation et il serait bête de se passer d’une manne financière aussi importante.
Enfin, le ministère de l’intérieur qui détient le mot de passe de ce huis-clos peut faire, de ce match, la preuve tangible de sa capacité à organiser et encadrer des évènements publics de cette envergure. La Tunisie nouvelle a aussi besoin de cette démonstration et l’opportunité est venue à point nommé. A quelques mois des élections vitales du pays, les forces de l’ordre ont une chance de soulager tout un pays, en démontrant que ses employés sont capables de sécuriser un évènement aussi particulier, avec une présence massive de citoyens, que nous osons espérer responsables et à la hauteur de l’évènement comme les supporters Sang et Or l’ont généralement été.
Aussi, la présence du public lors de ce match permettrait de rassurer tout le monde, quant à la capacité des instances à assurer la nouvelle saison sans huis-clos, chose très importante pour la réussite de la compétition locale. Alors, pourquoi les instances nationales se priveraient-elles d’une telle chance ?
Le rôle du bureau directeur
Hamdi Meddeb et ses collaborateurs sont, cette fois, dans la légitimité et le devoir de réclamer, haut et fort, la présence de leurs supporters. Il y va du devenir de l’équipe en Ligue des Champions africaine. En contrepartie, le bureau espérantiste doit présenter toutes les garanties d’organisation nécessaires à même de convaincre les instances de valider la requête.
De la vente des billets à la présence de stadiers professionnels, en passant par une vraie campagne de communication visant à encadrer les supporters à travers les groupes et les cellules, cela constituerait, par la même occasion, une opportunité de prouver que les supporters Sang et Or sont dans le vif de l’intérêt du club. Ce sera un test grandeur nature à l’aube de l’assemblée élective.
Le devoir des supporters
Sachant que la Confédération africaine de football (CAF) nous attend au tournant et que le club va devoir donner des gages importants, à commencer par la crédibilité du bureau directeur, les supporters Sang et Or vont devoir faire une démonstration de fairplay et de civisme. Une leçon qui clouerait le bec à tous les pessimistes. Un tifo de 90 minutes et une entrée/sortie dans la plus grande organisation, conjuguées avec un respect total des contraintes organisationnelles, quelle que soit la teneur du désagrément causé, sont des conditions nécessaires au bon déroulement de l’opération « retour des supporters aux gradins ». Tout débordement, aussi infime soit-il, serait fatal à toute tentative future de réconciliation ou de levée de huis-clos. Et ce sont bien sûr le club, que nous clamons soutenir, en premier lieu, et les supporters, ensuite, qui en paieront le prix autrement.
L’examen sera dur cette fois et c’est au public, longtemps privé d’accès au stade, de démontrer qu’il sait faire la différence entre un match de foot et tout autre évènement sociopolitique. Les supporters de l’Espérance ont déjà fait tant de sacrifices pour le club, car nous n’oublierons jamais un certain 8 avril 2010. Aujourd’hui, le sacrifice demandé serait plus grand, mais plus bénéfique au club et à ses supporters.
À bon entendeur, salut !
Iheb Ben Salem