Ce qui s’est passé hier soir dans les travées d’El Menzah pendant la première période du match gagné 4-0 face aux Algériens ne doit pas passer sous silence. Une grande bataille rangée avec échange de flammes : on se croirait dans un film américain à budget réduit et avec de piètres acteurs !
Deux scénarios circulent actuellement pour expliquer cet incident. Le premier concerne les groupes de supporters, qui veulent marquer leur territoire dans le virage sud, et le second est lié au « licenciement » d’Ezzedine Ajmi
L’escalade de la violence au nom d’une bâche ou d’un fauteuil risque de coûter cher aux groupes eux-mêmes, au club et même aux (vies des) supporters.
Batailles rangées entre groupes de … supporters
Zapatistas, Supras Sud et Ultras seraient donc la cause de cette mascarade. L’objet du crime ? Une banderole d’un groupe qui a été déchirée (vraisemblablement celle des Supras) par un autre groupe (vraisemblablement les Zapas) et a vu l’entrée ensuite dans l’arène du troisième groupe de supporters (vraisemblablement les Ultras). On dit par ailleurs que tout est parti en fumée, lorsqu’un fumigène lancé par un membre d’un groupe est tombé par mégarde sur celui d’un autre, mais peu importe !
Se livrer à une guerre de gang au vu de tout le monde pour un bout de chiffon ou un accident, voilà où on en est réduit du côté du virage. Et dire que ce formidable public pouvait à lui seul faire changer le cours d’un match, booster les siens et remporter des titres. Il s’est même dressé comme un rempart contre la violence policière gratuite, un certain 8 Avril 2010.
Alors « amis » supporters, réglez vos comptes ailleurs que dans les travées d’un stade, échangez des coups et des fumigènes, entretuez-vous pour une pseudo cause, faites ce que vous voulez, quitte à payer vous-mêmes les conséquences, mais s’il vous plaît, faites-le loin … dans un terrain vague, dans une arène louée pour la cause ou même mieux pour tout le monde : dans vos esprits. Ne faites pas de l’Espérance Sportive de Tunis (EST) et tous les autres supporters des otages de vos bêtises. On préfère un virage soudé qui enflamme le match avec une dakhla et pousse les joueurs comme il sait si bien le faire !
En souhaitant que la maudite Confédération Africaine de Football (CAF) ne vienne pas profiter de ces incidents pour nous sanctionner une énième fois, il est urgent de trouver des solutions à court terme (le prochain match à domicile sera vraisemblablement une demi-finale) puis à moyen terme. L’interdiction du stade aux moins de 18 ans est une option à ne pas écarter, surtout que les places accordées aux supporters Sang et Or sont ridiculement restreints.
Nous ne terminerions pas sans relever l’excellent comportement des forces de l’ordre présentes sur place, qui ne sont intervenus qu’à la fin de la bagarre pour séparer les fouteurs de troubles et évacuer ceux qui sont restés dehors.
Le nom d’Ajmi cité
Humilié lors de la dernière Assemblée Générale Extraordinaire par des personnes présentes et démis de ses fonctions de président du comité des supporters, Ezzedine Ajmi aurait menacé de se venger. Les actes commis samedi soir peuvent être assimilés à une coïncidence, mais pour beaucoup ils ne le sont pas. Le personnage, sa faculté à créer des problèmes et à provoquer la zizanie au sein du club jouent contre lui.
Un sentiment de revanche l’aurait ainsi poussé à faire commettre ce grabuge. A la « Curva Sud », ils vous raconteront volontiers la haine que beaucoup de Viragistes ressentent à ce Monsieur, notamment les Ultras et les Supras, qui sont même allés à faire signer deux pétitions pour le faire déboulonner de son poste. Et quand on sait aussi le rapprochement qui s’est fait entre Ajmi et le groupe des Zapatistas, le lien semble vite fait.
Les investigations sont en cours et la police est en train d’interroger une cinquantaine de personnes arrêtées. On en saura un peu plus très prochainement.
Manque d’encadrement et de vision
Au-delà de toutes les conclusions des investigations, ce qui est à mettre à l’index est le manque d’encadrement dont jouissent ces groupes, aussi bien de l’intérieur que de la part du comité des supporters. L’ancien régime étant derrière nous, 14 janvier oblige, le club est appelé à revoir de fond en comble sa stratégie d’encadrement des supporters, voire de communication avec le cœur battant du club.
Déjà que les anciens abonnés ont été de nouveau ignorés, lors de la vente des 10 000 tickets pour le match contre le Mouldia Club d’Alger (MCA) et que les adhérents ont été invités à une Assemblée générale (AG) Extraordinaire, en mettant à leur disposition les textes à voter 24 h avant la tenue des travaux – pour les plus chanceux -, nous nous questionnons de nouveau sur l’esprit qui anime les dirigeants actuels de l’Espérance, quant à la relation que le club veut avoir avec l’ensemble de ses supporters, de tous bords. Il est temps de se pencher sur le sujet, d’autant plus que les AG ordinaire et élective du 24 et 25 septembre seront de bonnes occasions pour en découdre.
Qui est le plus maltraité ?
Un peu plus haut, nous avons mentionné le bon comportement de la police lors de la guerilla inter-supporters. Ce qui s’est passé après la fin du match et le déploiement de cette banderole, certes provocatrice, nous fait gerber.
Des bombes lacrymogènes pleuvaient à la sortie du stade pour chasser le public du virage, au point de sentir le gaz au niveau du kiosque à essence Total. Imaginez alors la scène tout près du stade : vomis, hurlements, peur, le tout mélangé à la sauce matraque.
Une banderole, une « naghra » et nous voilà revenus au système Ben Ali. Passer du bon au très mauvais en simplement une heure, il faut être en Tunisie pour le vivre. Le chemin est encore long pour une réconciliation sociale entre concitoyens eux-mêmes déjà et avec le service de l’ordre ensuite.
Slim Azzabi