Nous nous souviendrons longtemps de ce dimanche 14 août, qui a vu les millions de téléspectateurs Sang et Or passer une soirée ramadanesque où se sont mélangés, le temps d’un match de foot, le sentiment de joie intense et celui des remords au goût amer. Une mixture de bonheur et de déception atteignant, pour certains, l’énervement, la rage.
L’Espérance Sportive de Tunis (EST), qui vient de faire match nul face au Wydad Athletic Club (WAC) dans un stade Mohamed V de Casablanca archicomble, sera passée à côté d’un résultat qui aurait marqué l’histoire des derbies maghrébins. Sauf que l’occasion a été lamentablement et doublement ratée par Maâloul et ses protégés : vaincre un des favoris du groupe dans son fief et faire un grand pas vers une place, probablement en première loge, en demi-finale de l’Orange CAF Champions League 2011.
Une première mi-temps d’une autre dimension
S’il m’était donné, avant le match, un point à ramener de Casa, j’aurais signé les yeux fermés. A la veille de la 3è journée, le WAC forçait le respect et intriguait les puristes par un jeu audacieusement offensif : en deux rondes les Wydadis ont scoré à 7 reprises dont 3 buts au Caire face à Al Ahly, sans oublier les 4 buts inscrits en coupe du Trône, contre l’OC Khouribga.
Pourtant, toutes les craintes et appréhensions, véhiculées avant cette confrontation, allaient s’estomper après le coup d’envoi donné par le Seychellois Eddy Maillet. L’Espérance, éblouissante d’aisance, de confiance et de métier, ne semblait guère intimidée par les 45 mille voix marocaines, qui scandaient le nom de leur club. Malgré les absences de Traoui et Msakni, le onze choisi par Maâloul occupait bien le terrain, quadrillait parfaitement les zones de manœuvres, à tel point que l’on se demandait où était passé le terrible WAC. Des erreurs défensives et des hésitations étaient au menu marocain avec, malgré tout, de temps à autre des tentatives, non sans gravité, par l’intermédiaire de l’intenable Mouhcine Iyajour.
Une première période presque parfaite d’un ensemble Sang et Or, qui a vu son métier le récompenser d’une avance méritoire de 2 buts, dont le premier a été le fruit d’un travail collectif impressionnant et surtout d’une résistance de Darragi à la charge et au pressing marocain pour servir Bouazzi sur un plateau, seul face à Lemyaghri, qu’il n’a trouvé aucune peine à battre.
Une seconde mi-temps sidérante
À la lumière de ce qui s’est passé en deuxième période, c’est à se demander comment un match peut-il aussi facilement basculer d’un camp à l’autre ? Comment une équipe alliant le spectacle au résultat, peut-elle sortir une copie aussi affligeante de retour des vestiaires?
Je crois que Maâloul n’est pas prêt d’oublier cette deuxième mi-temps qui a vu nos favoris concéder bizarrement des espaces à des Wydadis qui n’en demandaient pas tant. Un entrejeu disloqué, une arrière garde subissant les assauts marocains, une attaque absente, tels étaient les mets du menu espérantiste après la pause. Bref de quoi se payer les foudres du stade Mohamed V. Pourtant, tout était clair dès le départ. On ne devait surtout pas adopter une attitude exagérément défensive. On devait jouer intelligemment. Les joueurs l’ont fait le temps des premières quarante cinq minutes, avant de laisser place, ensuite, à un tohu-bohu inexplicable. Un repli excessif de nos milieux, une cassure de 40 mètres entre l’entrejeu et l’attaquant de pointe, le solitaire Yannick Ndjeng.
La responsabilité de Maâloul
En les circonstances et face à la domination des Rouge et Blanc, Maâloul aurait dû rééquilibrer ses lignes. D’autant plus que plus de 15 minutes après la reprise, le score était toujours de 2-0 en faveur du doyen tunisien. Le coach devait bien s’apercevoir par contre que l’entrejeu flanchait, concédait des espaces et que la défense prenait l’eau, certes de la partie droite où souffrait Derbali, mais force est de reconnaître que le latéral droit était comme lâché par Afful, la paire Korbi-Mouelhi, Hicheri et … Maâloul. Et ce n’est pas son changement par un Banana placé dans l’axe de la défense pour voir un Coulibaly dans son premier match, glisser à droite, qui pourrait atténuer les responsabilités de Maâloul dans les choix inadéquats de remplacements qui ont suivi. Bouazzi sortira plus tard laissant sa place à … Khaled Ayari et finalement Darragi, en fin de match, cèdera sa place au revenant Souissi.
Or, ne fallait-il pas penser, d’abord, à renforcer l’entre-jeu par un 3è récupérateur, afin d’atténuer les ardeurs du remuant Iajour et consorts, intelligemment revigorés par un Decastel s’apercevant du relâchement de notre milieu et notamment sur le flanc droit ? En faisant sortir Derbali, d’aucuns pensaient que Maâloul allait procéder à un replacement d’Afful en tant qu’arrière droit et recomposer un milieu à 3 avec un Banana dans le rôle de sentinelle, Mouelhi à droite et Korbi à gauche, pour réduire les espaces aux excentrés marocains et améliorer la couverture latérale. Donc il s’agissait tout simplement de passer du 4-2-3-1 au 4-3-2-1 par un simple et unique changement. Maâloul pouvait ainsi voir venir et garder ses cartes en mains.
Les choix adoptés sont non seulement discutables eu égard à la tournure du match, mais ils sont d’autant plus pénalisant qu’ils auraient pu coûter même le point du nul, après avoir mené 2-0 durant plus d’une heure de jeu. Je pense que Maâloul ne doit pas verser dans l’euphorie au point d’oublier la lucidité aux vestiaires. L’Espérance vient de rater une victoire précieuse, pourtant acquise plus facilement que prévu comparé aux les 2/3 du match. La rencontre de la 4è journée à Tunis, face à ce même WAC, sera encore plus difficile. Tout ce que nous souhaitons c’est que les Sang et Or parviennent à assurer les 6 points de leurs deux prochains matchs à domicile, avant d’aller affronter Al Ahly au Caire, au terme de la phase des groupes. Un challenge difficile qui aurait pu être beaucoup plus à notre avantage, si la bande à Maâloul n’avait pas gâché deux points largement à la portée, à Alger, face au Mouldia local (MCA), puis hier encore à Casa, où nos poulains n’ont pu préserver un avantage pourtant sécurisant.